Parce que choisir l’exercice adéquat est un art!
L’internet est rempli de débats passionné au sujet des meilleurs exercices possibles pour tel ou tel sport. Chacun possède son préféré et il semble qu’il faut absolument désigner l’un d’entre eux comme le roi de tous les exercices.
Lorsque votre vie professionnelle dépend des résultats sportifs d’athlètes qui, au fond, préféreraient ne pas faire de ‘muscu’ et vous jugent sur leur performance sur le terrain ou la piste, vous ne pouvez pas vous permettre ce genre de débat.
La culture Nord Américaine est amoureuse de la musculation et la plupart des athlètes sont contents si ils deviennent plus beaux sur la plage. Ce n’est cependant pas le cas partout dans le monde. Penser que tel ou tel exercice est le meilleur de tous lors du choix pour aider un athlète à gagner une médaille risque très bien de ne vous amener nulle part si ce n’est de se faire virer par manque de résultat. Même si le sportif est plus beau sur la plage.
Soyez Réaliste Avec Vos Choix
Quel est l’objet de la préparation physique (PP). Michel Pradet professeur et entraîneur français propose la définition suivante:
“l’objet de la PP est donc de dépasser le niveau de compétence motrice que permettrait la seule pratique de l’activité sportive choisie“.
Tous le monde peut aisément s’accorder avec cette définition mais elle sous entend clairement que la PP doit produire une progression dans l’activité sportive, un transfert de performance. Avant qu’on ne crie à l’évidence, veuillez considérer que cela ne semble pas être une pensée très répandue si j’en crois ce que je vois couramment dans le sport, et notamment dans les université US, c’est à dire une course à qui soulèvera la barre la plus lourde. Ce ne serait pas un mal si ces résultats n’étaient obtenus en raccourcissant les chemins de barres et utilisant des leviers plus avantageux, techniques qui sont justifiables en force athlétique (powerlifting) mais préjudiciables pour la plupart des autres sports.
Cependant quel devrait être le principe fondamental guidant le choix d’un exercice de renforcement? La recherche scientifique semble être d’un certain secours au début mais si on lit plus loin que les résumés, la confusion s’installe rapidement. Par exemple,un papier récent montre les progrès en quart de squat comme se transférant mieux sur la détente verticale et sur le sprint que les squats complets. Le problème est que Hartmann and Schmidtbleicher ont trouvé l’exact contraire sous des conditions légèrement différentes il y a quelques années. Qui croire? Le problème se corse de nouveau si on regarde les études electromyographiques (EMG). Si on peut trouver des activations de groupes musculaires plus élevées de façon constante sur certains exercices, ces études ne mesurent pas l’effet sur les performances. Il ya un grand pas à franchir! Sur le terrain cependant, on ne peut pas attendre des résultats scientifiques plus définitifs. Il faut agir!
Analysez Les Besoins De L’Athlète
La solution que je propose vient du terrain. Il ne faut pas espérer une série d’études en double aveugle avec groupe contrôle. La seule garantie que je peux donner est le fait que mes athlètes ont glané un certain nombre de médailles mondiales et Olympiques alors que je suis un privé, pas un entraîneur national à qui on confie les meilleurs sportifs. C’est tout.
La technique sportive est souvent pensée comme séparée des qualités physiques. Je pense cependant que les deux sont intimement liées. Lorsque j’ai rencontré Charles Poliquin la première fois, il y a 20 ans, il a dit quelque chose pendant le repas lors d’un de ses séminaires, qui m’a marqué. Il a dit que le culturisme était une affaire d’hormones mais que le sport appartenait au système nerveux. En gardant ceci à l’esprit, bien des années plus tard, j’ai été amené à formuler le fait que la bonne technique est la séquence optimale de contraction / relâchement musculaire, dans le bon ordre, au bon rythme et à une vitesse adequate à la réalisation d’un but intentionnellement préétabli.
Le role de la PP est de lever quelconque obstacle qui puisse changer cette séquence optimale. La puissance est spécifique à un schéma moteur donné et cela explique pourquoi de grands progrès en musculation bien souvent n’accouchent d’aucun progrès dans l’activité spécifique. La raison se cache dans cette séquence.
Le choix d’un exercice de renforcement doit être guidé par le fait que l’exercice demande à l’athlète de résoudre le même problème qu’il rencontre dans sa discipline.
Ceci est la clé du transfert de performance. Je dis résoudre parce que c’est exactement ce que fait le système nerveux, qui crée des adaptations afin de répondre à une question posée, à un stimulus.
Ceci implique de nombreuses choses cependant.
– En tout premier lieu, cela veut dire que la technique d’exécution des exercices doit être rigoureusement correcte. Comment assurer un transfert si l’athlète résout l’exercice d’une autre façon que celle pour laquelle vous l’aviez choisi ? Lorsque je vois des cyphoses du rachis succédant à des extensions de hanches, j’ai la nausée! Rien ne le justifie et surtout pas l’envie de se donner à fond. Les schémas moteurs effectués à hautes intensité restent! Veuillez noter que je parle d’activation et non de position, certains sports peuvent requérir une attitude cyphosique lors d’extension de hanche mais c’est un autre sujet.
Considérations
– Lorsqu’un sportif ne peut adopter la position adéquate à un exercice pertinent, alors effectuer le travail pour que cela lui devienne possible aura plus de transfert sur sa performance que de d’effectuer le dit exercice n’importe comment.
– Il faut être capable d’oublier la quantité de poids sur la barre. C’est dur si on vient de la force athlétique, je sais. Le poids absolu sur la barre n’est pas aussi important que son évolution. Il est un fait que la performance absolue dans des exercices de nature générale perd d’autant plus sa relation avec la performance spécifique que le niveau de pratique s’élève. Il se peut que vous battiez plein d’Olympiens en squat cependant vous êtes pas prêt de mettre les pieds sur un podium!
– Le type de déclaration à l’emporte pièce tel que “les sportifs n’ont pas besoin de mouvement d’isolation” n’ont pas lieu d’être. Il se peut que la solution au désordre dans la fameuse séquence soit de faire des bibi! (des brrrâs ). Je ne suis pas coutumier du fait mais si c’est ce qui rend l’athlète meilleur je prescrirai des Scott curls.
– L’entraîneur d’athlétisme Dan Pfaff a dit que la limite entre la rééducation et l’entraînement de haute performance est très fine. Je suis tout à fait d’accord. La cause du désordre dans la séquence n’est pas toujours la force. Il faut à l’entraîneur une grande connaissance du fonctionnement du corps afin d’appréhender les possibles problèmes. Lorsque la séquence optimale n’est pas possible, alors s’installe un schéma de compensation. Notre rôle est de le détecter et de le rendre inutile en éliminant sa raison d’être. Ceci permettra l’accès à des puissances supérieures. Puissances auxquelles un autre problème sera frein à une nouvelle progression etc… Il nous faut les détecter avant que ceux-ci ne causent de blessures ou n’inhibe l’athlète.
Conclusion
De même que la recherche du programme magique pour tout le monde est une quête futile, le débat sur quel est le meilleur exercice ne mérite pas qu’on y perde son temps. A la place, adoptons une approche transversale en choisissant la résolution nécessaire d’un problème commun à l’exercice de renforcement et à la discipline sportive.
Références
Influence of Squatting Depth on Jumping Performance.Hartmann, Hagen1; Wirth, Klaus1; Klusemann, Markus2,3; Dalic, Josip1; Matuschek, Claus; Schmidtbleicher, Dietmar. Journal of Strength & Conditioning Research:December 2012 – Volume 26 – Issue 12 – p 3243–3261
Joint-Angle Specific Strength Adaptations Influence Improvements in Power in Highly Trained Athletes, by Rhea, Kenn, Peterson, Massey, Simão, Marin & Krein, in Human Movement (2016).